L’amie prodigieuse : une saga en 4 tomes qui nous emporte dans le tourbillon de la vie napolitaine. J’ai terminé (ou plutôt dévoré) récemment le dernier tome, qui est dans la même veine que les précédents : fantastique. Pour prolonger un peu le plaisir et le partager, je m’y replonge volontiers le temps de cet article. Cependant, je n’en parlerai pas dans le détail, afin de ne pas dévoiler trop de l’histoire…
L’amie prodigieuse : l’histoire d’une amitié
La saga L’amie prodigieuse se déroule principalement dans un quartier défavorisé de Naples. Le premier livre commence avec l’enfance de deux copines : Elena et Lila. Au fil des livres suivants, nous les accompagnons dans leur vie au cours de la seconde moitié du XXème siècle. Elena en est la narratrice. C’est une amitié forte, profonde et tourmentée. Une amitié ancrée dans un quartier, où les amis d’enfance grandissent et finissent majoritairement mariés ensemble en reprenant la même voie que leurs parents. Sauf Elena, qui se lance corps et âme dans les études. Elle estime que vivre dans son quartier n’est pas une finalité, et encore moins une fatalité. La volonté d’Elena d’aspirer à autre chose ne se fera pas sans impact.
[…] je commençai à me sentir clairement une étrangère, rendue malheureuse par le fait même d’être une étrangère. J’avais grandi avec ces jeunes, je considérais leurs comportements comme normaux et leur langue violente était la mienne. Mais je suivais aussi tous les jours, depuis six ans maintenant, un parcours dont ils ignoraient tout et auquel je faisais face de manière tellement brillante que j’avais fini par être la meilleure.
Ce décalage teintera ses relations avec sa famille ou ses amis. Elena sera considérée comme une intellectuelle qui a réussi mais aussi comme quelqu’un qui rejette ses origines et qui en a honte. A travers toutes ses années, ce qui la tiendra à flot sera toujours son amitié avec Lila. Une relation tellement particulière qu’elle l’inspire, la rassure, la porte tout en la tourmentant et la rendant malheureuse en même temps.
Elle est perfide et l’a toujours été mais elle est bien autre chose, il faut la supporter.
Une histoire avec pour décor une Italie en plein mouvement
En quelques mots, Elena Ferrante plante le décor. Pas besoin de longues descriptions pour s’imaginer à Naples et faire partie du quartier. Elle narre avec brio des instants de vie. Ainsi, on a vraiment l’impression d’être au cœur de la relation entre Elena et Lila.
En arrière plan de l’histoire, on perçoit les tourments d’une Italie qui change : le boom économique, le terrorisme des années 70, la corruption, la place de la femme… Comment se situer face à ces bouleversements ? Changer de vie mais à quel prix ? ou alors, pourquoi ne pas vivre dans la continuité de ses parents ?
A 15 ans, ils n’ont déjà plus la fragilité de la jeunesse et le poids du futur devient très important. Chacun des personnages sera confronté à ces questions et choisira une voie, selon ses conviction, son histoire, son influence ou son pouvoir.
Les relations amoureuses ne sont pas en reste. La famille traditionnelle évolue, on n’hésite plus à se séparer, à vivre ensemble sans être marié. Le schéma traditionnel des parents est remis en question. Elena et Lila essaient de s’affranchir du regard des autres, à vivre pleinement leur passion, afin de trouver leur propre équilibre.
Un mot sur l’auteur
L’auteur écrit sous le pseudonyme Elena Ferrante et a choisi de rester dans l’anonymat. Elle accepte les interviews avec parcimonie, et ne les tiendra que par écrit. Elle ne souhaite pas montrer son visage.
Rares sont les informations disponibles à son sujet. On sait d’elle qu’elle est une femme, mère de famille et que l’Amie prodigieuse a une part d’autobiographie.
Alors que ses livres sont traduits dans le monde entier et que sa saga connaît un véritable succès, elle choisit l’ombre. Elle refuse, que ses propos ou son visage puisse teinter ses romans. Ainsi, on aime ses livres pour son histoire et son écriture, et non pour ce qu’elle est, elle.
Je trouve cela remarquable qu’elle ait choisit cette position, à l’heure où beaucoup de personnes rêvent d’être mis à la lumière ! Elle s’efface pour mieux laisser parler ses personnages… Et c’est bien réussi !
3 commentaires
Tu résumes très bien les enjeux des 4 tomes de la saga, j’espère que ça fera envie à d’autres ! Mais pour moi, il y a aussi une bonne part de noirceur dans cette histoire qui en rebutera peut-être certains… En tout cas moi j’ai passionnément aimé cette lecture que je quitte avec regret. Quant à l’auteur, il me semble évident qu’elle y a mis une part de sa vie au point que j’ai quand même une certaine curiosité à son égard 😉
Carrément ! car je suis allée très vite me renseigner sur elle, sans avoir beaucoup d’infos. Mais j’aime aussi qu’elle ne se mette pas beaucoup en avant, contrairement à beaucoup d’écrivains contemporains.